Abidjan, Côte d’Ivoire- L’Institut Français de Côte d’Ivoire a vibré hier soir aux couleurs de la Guinée lors d’une soirée spéciale organisée dans le cadre du Festival des Musiques Urbaines d’Anoumabo (FEMUA). Pays invité d’honneur de cette édition, la Guinée, terre de Bembeya Jazz National et des Ballets Africains, affiche une ambition claire : reconquérir sa place de proue sur l’échiquier culturel continental. Moussa Moïse Sylla, ministre guinéen de la Culture, du Tourisme et de l’Artisanat, s’est confié à Claudy Siar, journaliste emblématique de RFI, lors de l’émission « Couleur Tropicale », révélant les motivations et les stratégies à l’origine de cette renaissance culturelle.

Interrogé sur le processus ayant permis à la Guinée de devenir pays invité d’honneur du FEMUA, le ministre Sylla a souligné l’engagement profond de son pays dans une refondation globale, plaçant la culture au cœur des priorités sous l’impulsion du Président Mamadi Doumbouya. « Depuis trois ans, la Guinée s’est engagée dans une refondation profonde de tous les secteurs clés de son développement. La culture est véritablement au centre de cette dynamique portée par le Président Mamadi Doumbouya », a-t-il déclaré. Il a également rappelé le riche héritage culturel guinéen : « Nous avons été un pays qui attirait les cultures à travers le continent. Je le rappelais hier, lors de la cérémonie d’ouverture du FEMUA : nous sommes le pays de Bembeya, nous sommes le pays des Ballets Africains. »
Pour le ministre, cette invitation au FEMUA représente une opportunité cruciale pour réaffirmer la présence de la Guinée sur la scène internationale. « Il était important, dans le contexte de cette refondation en cours, de trouver des moyens permettant d’affirmer au monde culturel, mais aussi à la communauté internationale, que la Guinée est de retour. Et quoi de plus significatif que le FEMUA, une plateforme offrant une grande visibilité ? » Il a également partagé son enthousiasme après l’appel d’Asalfo, figure emblématique du groupe Magic System et initiateur du FEMUA : « Quand Asalfo m’a appelé, j’étais à Nzérékoré, les étoiles se sont illuminées. J’ai dit : écoute, il faut qu’on se rappelle rapidement. Le temps pour moi de consulter les autorités le Premier ministre, le Président de la République et ils ont tous donné leurs bénédictions. »
À la question de Claudy Siar sur les initiatives concrètes envisagées par la Guinée pour renforcer sa coopération culturelle avec d’autres nations africaines à travers des événements comme le FEMUA, Moussa Moïse Sylla a évoqué une approche pragmatique, axée sur la revitalisation des liens existants et la promotion des échanges directs entre acteurs culturels. « Il faut d’abord rétablir les liens qui existaient par le passé, mais qui n’ont pas été suffisamment renforcés. C’est le cas, par exemple, avec la Côte d’Ivoire. Un accord sur le secteur culturel existe depuis 2009, mais ces accords manquent souvent de suivi après leur signature. Il est nécessaire de les dépoussiérer, en commençant par la Côte d’Ivoire, pour créer un pont culturel favorisant les échanges entre les différents acteurs. »
Le ministre a également souligné l’importance de la forte délégation guinéenne présente au FEMUA, composée d’acteurs culturels établissant des liens directs avec leurs homologues ivoiriens. « Je suis venu avec une grande équipe. Ce sont des acteurs culturels qui interagissent directement avec leurs homologues ivoiriens. Des rencontres comme le FEMUA sont essentielles pour créer cet espace de partage immédiat. C’est ce que nous souhaitons mettre en place rapidement. » Il en a également profité pour lancer un appel mondial : « Nous invitons le monde entier à venir en République de Guinée. »
Moussa Moïse Sylla a enfin abordé la nécessité de modifier les perceptions parfois négatives associées à son pays. « Nous sommes souvent confrontés à des visions stéréotypées dans nos pays. Par exemple, un pneu brûlé attire souvent plus l’attention qu’une école inaugurée. Il est essentiel de changer ce paradigme. La nouvelle Guinée est une Guinée dynamique et en mouvement. »
Dans cette optique, la Guinée s’investit dans l’organisation d’événements culturels nationaux pour attirer l’attention internationale. « Nous avons relancé un festival chez nous en Guinée. L’année dernière, nous avons organisé le Festival International du Djembé pour inviter le monde à découvrir la Guinée, terre de percussion. Ce festival a connu un grand succès et a permis de partager notre vision de la politique culturelle guinéenne. »
Cet entretien avec Moussa Moïse Sylla a mis en lumière la détermination de la Guinée à regagner sa place sur la carte culturelle africaine. L’invitation au FEMUA constitue une étape majeure dans cette ambition, marquant le début d’une nouvelle ère de coopération et d’échanges pour le pays. Il reste à observer comment cette dynamique se concrétisera dans les mois et les années à venir.


Mohamed Dramé
Envoyé spécial à Abidjan
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